La méthode de la Conversation spirituelle

Texte issu du document préparatoire au Synode des évêques (2021-2023)

Comprendre l’objectif de la Conversation spirituelle

La conversation spirituelle vise une profondeur d’écoute de chacun ainsi qu’une attention à la qualité des mots prononcés. Il s’agit de prêter attention aux mouvements spirituels intérieurs en soi et dans les autres au cours de la conversation, ce qui exige d’être attentif à ce qui s’exprime au-delà des simples mots prononcés. Cette qualité d’attention est un acte de respect, d’accueil et d’hospitalité envers les autres tels qu’ils sont. C’est une approche qui prend au sérieux ce qui se passe dans le cœur de ceux qui conversent. Deux attitudes nécessaires sont fondamentales pour ce processus : l’écoute active et le parler avec le cœur.

L’objectif de la conversation spirituelle est de créer une atmosphère de confiance et d’accueil, afin que les personnes puissent s’exprimer plus librement. Cela les aide à prendre au sérieux ce qui se passe en elles lorsqu’elle s’écoutent les unes les autres et parlent entre elles. En définitive, cette attention intérieure nous rend plus sensibles à la présence et à la participation de l’Esprit Saint au sein même du processus de partage et de discernement.

La conversation spirituelle est focalisée sur la personne que nous écoutons, sur nous-mêmes et sur ce que nous vivons à un niveau spirituel. La question fondamentale est : “Que se passe-t-il dans l’autre personne et en moi, et comment le Seigneur agit-il ici ?”

a) L’écoute active

    • Par l’écoute active, l’objectif est d’essayer de comprendre les autres tels qu’ils sont. Nous écoutons non seulement ce que l’autre personne dit, mais aussi ce qu’elle voulait dire et ce qu’elle pourrait expérimenter à un niveau plus profond. Cela signifie écouter avec un cœur ouvert et réceptif.
    • Cette façon d’écouter est “active” car elle implique de prêter attention aux différents niveaux d’expression de l’autre. Pour ce faire, il faut participer activement au processus d’écoute.
    • Nous écoutons l’autre pendant qu’il ou elle parle, sans nous concentrer sur ce que nous allons dire ensuite.
    • Nous accueillons, sans jugement, ce que l’autre personne dit, peu importe ce que nous pensons d’elle ou de ce qu’elle a dit. Chaque personne est experte de sa propre vie. Nous devons écouter sans jugement d’une manière qui soit “plus disposée à donner une bonne interprétation à ce que l’autre dit au lieu de le condamner comme faux” (Exercices spirituels de saint Ignace, n° 22).
    • Nous devons croire que l’Esprit Saint nous parle à travers l’autre personne.
    • Accueillir sans préjugés est une manière profonde d’accueillir l’autre dans son unicité radicale.
    • L’écoute active, c’est se laisser déplacer par l’autre et apprendre de lui.
    • L’écoute active est exigeante car elle demande de l’humilité, de l’ouverture, de la patience et de l’implication, mais c’est une manière féconde de prendre les autres au sérieux.

b) Parler avec le cœur

    • Il s’agit d’exprimer sincèrement soi-même, sa propre expérience, ses sentiments et ses pensées.
    • Cela consiste à parler de sa propre expérience et de ce que l’on pense et ressent vraiment.
    • Nous assumons la responsabilité non seulement de ce que nous disons, mais aussi de ce que nous ressentons. Nous ne blâmons pas les autres pour ce que nous ressentons.
    • Nous partageons la vérité telle que nous la voyons et telle que nous la vivons, mais nous ne l’imposons pas.
    • Parler avec le cœur, c’est offrir un don généreux à l’autre, en échange d’une écoute active.
    • Ce processus est fortement enrichi par une pratique personnelle régulière de la prière d’examen ou de relecture de sa vie. Sans une habitude de discernement et de connaissance de soi et de la manière dont Dieu est présent dans sa propre vie, on ne peut pas écouter activement les autres ou parler avec le cœur.

En résumé, on peut ainsi lister les attitudes souhaitées pour vivre une conversation spirituelle :

    • Écouter activement et attentivement
    • Écouter les autres sans jugement
    • Prêter attention non seulement aux mots, mais aussi au ton et aux sentiments de celui qui parle.
    • Évitez la tentation d’utiliser le temps pour préparer ce que vous allez dire au lieu d’écouter.
    • Parlez intentionnellement
    • Exprimez vos expériences, vos pensées et vos sentiments aussi clairement que possible.
    • Ecoutez vous-même activement, en étant attentif à vos propres pensées et sentiments lorsque vous parlez.
    • Surveillez les éventuelles tendances à l’égocentrisme lorsque vous parlez.

Mener une conversation spirituelle : Les étapes essentielles

1. Préparation

Avant de se rendre à la réunion de groupe, les participants prennent le temps d’une prière et d’une réflexion personnelles sur la question à traiter.
Généralement, des informations de base ainsi que des points et des questions pour la prière sont fournis.
Un temps adéquat d’environ 30 minutes à 1 heure peut être prévu à cet effet.
À la fin de ce temps de prière, les participants font le point sur les fruits de leur prière et décident de ce qu’ils vont partager avec le groupe.

2. Rassemblement

Idéalement, chaque groupe peut comprendre environ 6 à 8 personnes. Un facilitateur est désigné pour la réunion du groupe et il ou elle accueille tous les participants.
Une prière d’ouverture est dite, et chaque personne peut partager un ou deux mots qui décrivent son état intérieur à ce moment-là.
Le facilitateur peut également récapituler brièvement la séquence des étapes comme ci-dessous. En général, on demande aussi des volontaires pour la prise de notes et le contrôle du temps.

3. Le premier tour

Chaque personne parle à tour de rôle de ce qui s’est passé pendant le temps de prière personnelle et partage les fruits de sa prière.
Chacun dispose du même temps de parole (par exemple, 3 minutes).
L’objectif est d’écouter l’autre plutôt que de penser à ce que l’on veut dire.
Les participants sont invités à ouvrir leur cœur et leur tête afin d’écouter celui ou celle qui parle, et à être attentifs à la manière dont l’Esprit Saint agit.
Entre chaque personne, le groupe peut faire une brève pause pour absorber ce qui a été dit.
Au cours de ce tour, il n’y a pas de discussions ou d’interactions entre les participants, sauf pour demander des précisions sur un mot ou une phrase si nécessaire.

4. Silence

Un temps de silence est observé, pendant lequel les participants réfléchissent à la façon dont ils ont été touchés pendant le premier tour, à ce qui les a frappés pendant qu’ils écoutaient, et aux points notables de consolation ou de désolation, si c’est le cas.

5. Le deuxième tour

Les participants partagent ce qui a émergé en eux pendant le temps de silence.
Personne n’est obligé de parler, et les participants peuvent partager spontanément sans ordre particulier.
Ce n’est pas un moment pour discuter ou réfuter ce que quelqu’un d’autre dit, ni pour évoquer ce que les participants ont oublié de mentionner lors du premier tour. Il s’agit plutôt d’une occasion de répondre à des questions comme celles-ci :

    • Comment ai-je été affecté par ce que j’ai entendu ?
    • Y a-t-il un fil conducteur dans ce qui a été partagé ? Manque-t-il quelque chose que je m’attendais à entendre ?
    • Ai-je été particulièrement touché par un partage particulier ?
    • Ai-je reçu un aperçu ou une révélation particulière ? De quoi s’agit-il ?
    • Où ai-je ressenti un sentiment d’harmonie avec les autres lors de nos partages ?

Ce deuxième tour permet au groupe de réaliser ce qui les unit. C’est là que les signes de l’action de l’Esprit Saint dans le groupe commencent à se manifester, et que la conversation devient une expérience de discernement partagé.

6. Silence

Un autre temps de silence est observé pour que les participants notent comment ils ont été touchés pendant le deuxième tour, et en particulier quels points clés semblent émerger dans le groupe.

7. Le troisième tour

Les participants partagent ce qui est ressorti du temps de silence précédent. Ils peuvent également prendre note de la manière dont l’Esprit Saint peut toucher le groupe.
Une prière de remerciement peut conclure la conversation.

8. Bilan et rapport

 Enfin, le groupe peut brièvement revoir et réfléchir sur comment la conversation s’est déroulée, et décider des points principaux qu’il va rapporter de la conversation.

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